- 4 janvier 2016
- Envoyé par : Enjin
- Catégorie: Actualités macro-économiques

Le début d’une année civile est toujours propice à une réflexion plus large et générale sur les grandes problématiques du moment. Transdisciplinaires, elles s’analysent aussi bien à l’échelle de la planète, comme le réchauffement climatique, qu’à une échelle plus réduite limitée à certaines parties du monde, comme les crises géopolitiques de plus en plus exacerbées, ou encore à l’échelle d’un pays ou d’une communauté.
Si, ainsi que nous l’avons maintes fois évoqué, le grand retour du politique est aujourd’hui plus que jamais nécessaire face aux ruptures économiques et sociétales qui nous attendent, nous nous contenterons d’évoquer, ici, quelques défis économiques au seuil de cette année 2016.
Allemagne
- Intégrer le million de réfugiés politiques sur le marché du travail sans compromettre la réussite de l’instauration d’un salaire minimum débutée il y a tout juste un an et qui a largement contribué à soutenir la demande intérieure du pays.
- Recouvrer la confiance en son processus industriel et en son corollaire, la gestion participative, quelque peu ébranlée par l’affaire Volkswagen.
Arabie Saoudite
- Stopper la spirale baissière du prix du baril, qu’elle a elle-même enclenchée pour des raisons géopolitiques et de maintien de ses parts de marché. Ce cercle infernal contraint l’ensemble des pays producteurs à augmenter leur production pour maintenir leur recette budgétaire, amplifiant ainsi le déséquilibre de l’offre.
- Réduire également un déficit budgétaire qui s’élève à 20% du PIB à cause des dépenses sociales (dans le but de maintenir le fragile équilibre sociétal) et des coûts militaires qui explosent dans la guerre de religion qu’elle mène contre son grand ennemi chiite, l’Iran, et éviter d’épuiser ses importantes réserves (664 Mds$) dans le maintien du peg (parité) de sa monnaie avec le dollar.
Brésil
- Éviter qu’une récession trop sévère (-3%), aggravée par la chute des prix des matières premières, ne provoque l’éclatement des finances publiques et que la charge de la dette, bien qu’encore faible (65% du PIB), n’explose sous le coup d’un renchérissement des taux d’intérêt et de la forte chute du réal (-31% en 2015).
- Assainir la vie politique comme la vie économique pour mettre en place une technostructure digne d’un grand pays émergent.
Canada
- Soutenir la consommation, dernier moteur d’une économie canadienne en récession pour la seconde fois en 6 ans (victime de la chute des prix des matières premières), et redéployer l’investissement du secteur minier (actuellement en crise) vers le secteur industriel en mal de compétitivité malgré la forte baisse de la devise en 2015 (-12%).
- Profiter de la bonne santé de son voisin américain pour améliorer la valeur ajoutée de ses échanges et pour substituer des biens industriels aux produits énergétiques.
Chine
- Trouver le juste compromis entre la poursuite de la mutation de son économie vers la consommation et les services (plutôt que vers l’exportation de pans industriels inefficients) et la croissance nécessaire pour éviter une explosion sociale et financière.
- Persévérer dans sa volonté de libéraliser le système productif sans perdre le pouvoir de l’État central, tout comme le pilotage de la libéralisation de sa monnaie sans provoquer une dépréciation non souhaitable et coûteuse tant sur les plans financier que géopolitique.
Espagne
- Raffermir la solidité de sa résurgence économique avec ses 3,3% de croissance qui font du pays une des zones les plus dynamiques de l’Europe grâce aux records historiques de ses exportations (notamment dans l’automobile) et d’afflux de touristes, permis par une politique drastique d’ajustement des prix intérieurs.
- Transformer ce succès économique en succès social en faisant baisser un taux de chômage toujours élevé, malgré la création d’un million d’emplois en un an, et en réduisant les tensions politiques qui menacent l’intégrité du territoire avec les menaces d’indépendance régionale.
États-Unis
- Réussir la normalisation de sa politique monétaire en poursuivant la hausse des taux courts sans enclencher un mouvement trop violent sur les taux longs, afin de maintenir les taux réels aussi bas que possible et ainsi réduire la charge de la dette tout en évitant une appréciation trop vive du dollar pour ne pas affecter l’économie réelle.
- Éviter que la hausse des taux de la première monnaie internationale ne déstabilise à la fois le secteur domestique du high yield (déjà mis à mal par la chute des prix énergétiques) et les devises émergentes en renchérissant le coût d’une dette tant publique que privée.
France
- Éviter que la baisse de l’euro, des taux extrêmement faibles (voire négatifs) et la baisse du prix du pétrole, facteur historique de soutien de l’économie française, ne dissuadent le pouvoir politique d’appliquer une politique économique structurelle ambitieuse qui permettrait d’augmenter la croissance potentielle de l’économie.
- Sortir du piège de la politique d’austérité imposée par l’Europe par manque d’ambition, en proposant un programme économique, volontariste et courageux, pour sortir des systèmes de rentes qui favorisent la génération du baby-boom au détriment des jeunes générations (déjà bien mal en point avec un chômage record et un fardeau de la dette qui deviendra tôt ou tard insoutenable).
Grèce
- Sortir de la spirale négative « endettement / austérité / récession » dans laquelle le pays est tombé et que l’Europe s’évertue à maintenir (malgré des aides financières conséquentes) en refusant tout aménagement de la dette grecque, après avoir torpillé sa volonté de poursuivre une politique économique alternative malgré un appui démocratique incontestable.
- Trouver le courage politique de réformer l’ensemble d’une économie loin du standard de l’efficience, tout en préservant, autant que faire se peut, une population déjà largement touchée par une récession historique, conséquence de plans drastiques d’ajustement mal calibrés.
Inde
- Rester le champion toutes catégories de la croissance (avec plus de 7% en 2015). Croissance soutenue par un pouvoir politique sachant manier la politique de l’offre aussi bien que la politique budgétaire, alors que la politique monétaire devient accommodante grâce à une moindre tension inflationniste (merci aux cours du baril de pétrole).
- Continuer de privilégier l’éducation et dégager des marges de productivité afin de rendre son économie moins polluante et énergivore.
Italie
- Poursuivre l’effort entamé par le pouvoir politique pour moderniser une économie sortant de 3 années de récession et que les investisseurs internationaux n’ont pas manqué de saluer par un retour des capitaux (permettant à la bourse de Milan d’afficher un des meilleurs scores des places financières occidentales).
- Engager les réformes promises en matière de marché du travail, de compétitivité et d’éducation, et qui ont permis à Matteo Renzi d’échapper, jusqu’ici, à la remise en cause du système économico-politique actuel, contrairement à ce qu’ont connu l’Espagne, le Portugal et la Grèce.
Japon
- Décocher enfin la troisième flèche des Abenomics avant que les 610 Mds€ injectés chaque année par la BoJ ne noient définitivement l’économie nippone qui a, jusque-là, échappé de justesse à une croissance réelle négative (l’impact positif de la chute du baril sur la croissance nominale étant quasiment annulé par des prix négatifs).
- Reverser aux salariés une partie de la hausse des profits des entreprises, permis par la dépréciation du yen déclenchée depuis 2 ans afin de soutenir une consommation toujours aussi fragile.
Royaume-Uni
- Maintenir l’économie à son niveau de croissance potentielle autour de 2,3% (grâce à une consommation toujours forte et un chômage à son taux naturel) et parvenir à enclencher le processus de normalisation monétaire dès que les pressions désinflationnistes du pétrole cesseront de peser sur le niveau des prix.
- Choisir définitivement si le pays veut demeurer dans l’Union européenne ou plutôt regarder du côté de son allié transatlantique (dans ce cas, ne pas exiger de ses partenaires européens des concessions unilatérales qu’ils ne pourront justifier politiquement que par leur faiblesse).
Russie
- Gérer la chute du prix du baril de pétrole par la dépréciation du rouble, tout en limitant l’inflation importée pour défendre les recettes publiques, sans aggraver ni les problèmes de financement de l’économie par des taux d’intérêt trop élevés, ni la récession qui sévit actuellement (-4% en 2015).
- Continuer d’organiser la substitution aux importations (rendues difficiles pour cause de sanctions occidentales) par la création d’un tissu économique domestique efficient grâce à des réformes structurelles de libéralisation du marché.
Zone euro
- Choisir entre renforcer l’intégration économique pour devenir une vraie zone monétaire optimale, avec des transferts financiers entre pays permis par une harmonisation fiscale et sociale mais également par l’ébauche d’un budget fédéral et d’une politique budgétaire et monétaire unique,
et déconstruire cette zone de monnaie unique en laissant le choix à ses membres de retrouver une politique de change autonome pour sortir du piège de l’austérité et du nivellement par le bas. - Redonner l’espoir à une économie mondiale en berne par la réintégration des 300 Mds€ d’excédents de la balance commerciale de la zone (équilibrée en 2010), conséquence d’une politique de déclinisme (malthusienne et mercantiliste) dans les importations et l’investissement, pour le plus grand profit d’une économie mondiale plus équilibrée.
Le décor est planté.
Aux pouvoirs politiques et économiques de trouver le courage d’aborder les problèmes et d’y apporter les compromis acceptables avec une réelle volonté d’aboutir dans le seul et unique but de trouver la meilleure solution aux défis qui leur sont propres, sans toutefois en reporter la charge et les effets collatéraux sur les autres communautés, afin d’apaiser quelque peu les tensions intérieures et extérieures.
Si ces vœux peuvent paraître pour certains un peu éloignés de leur cercle de vie, je me permets de vous souhaiter au nom de toute l’équipe de montbleu finance « une belle année 2016 »
Éric Venet, Directeur de la gestion de montbleu finance
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Source : Montbleu Finance